Quelle couronne, pour quel roi ?
Vendredi Saint est un jour particulier, très important pour les chrétiens, car c’est un jour de mystère. Ce jour de la semaine sainte correspond en effet à la mort de Jésus de Nazareth. Ce jour est ainsi celui de sa Passion. Arrêté, jugé, renié, flagellé, humilié, crucifié, couronné par dérision d’une couronne tressée d’épines qui lui lacèrent le front, l’homme Jésus, expire cloué au bois d’une croix, comme un malpropre. Au sommet de cette dernière est ajoutée une inscription ou titulus avec les lettres INRI. Cet acronyme signifie Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum, c’est-à-dire Jésus de Nazareth roi des Juifs. Par ces quatre lettres, c’est le motif de la condamnation à mort de Jésus qui est ainsi signalé. Celui qui est mis à mort, l’est au titre d’une raison politique : celle d’une royauté exercée par un homme sans pouvoir.
Combien parmi nous, les Hommes, sont ceux qui rêvent de pouvoir ? Combien parmi nous, les Hommes, chérissent l’idée d’être couronnés par le succès, la gloire, la reconnaissance d’autrui ? Pour nous, les Hommes, la couronne est le symbole par excellence de la supériorité d’un Homme sur ses semblables, le signe d’une domination qui contraint autrui, s’impose aux autres par la force ou la ruse plus que par la justice ou l’humilité. Cet ornement pour la tête, en forme recourbée, attise toutes les convoitises. Être ceint d’une couronne, c’est recevoir la satisfaction d’un des plus puissants désirs humains : être roi face à des sujets.
Or Jésus est couronné. Néanmoins, sa tête ne luit pas d’or ou d’argent, d’émeraudes ou de diamants qui scintilleraient à la lumière, mais de sang. Quel curieux monarque ! Refusant de résister à ceux qui l’appréhendent, comme à ceux qui le martyrisent, Jésus n’est pas pris, il se donne. Mené à la mort, seul, alors que quelques jours auparavant une foule l’acclamait tel un nouveau David entrant à Jérusalem. Il ne maudit pas la versatilité des Hommes, mais il les pardonne. « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font » prie-t-il pour eux, agonisant. Est-ce ainsi que les rois considèrent les Hommes ? Non. Mais alors Jésus est-il un roi ? Oui, mais d’un royaume où les règles du jeu ne sont pas celles de la vie politique d’ici-bas. Un roi autre, d’une royauté exercée autrement. Non par ambition et amour propre mais par vocation et amour du monde. Et dans ce paradoxe des valeurs que la Passion incarne se tient la puissance de Jésus : sa puissance, qui dépasse tous les pouvoirs institués qui suscitent les passions des Hommes, c’est l’Amour.
Quand les Hommes comprendront enfin la vigueur, l’énergie, la force que recèle cette attitude, alors ils saisiront une part du mystère Pascal qui fait passer de la nuit des illusions à la lumière de la vérité.
Sara Hernandez.
Animatrice en pastorale.